L’accord de pêche UE-Maroc dans les filets de Bruxelles

L’Espagne multiplie les pressions avec l’aide de la France pour tenter d’imposer à la Commission européenne la prorogation pour une année supplémentaire de l’accord de pêche UE-Maroc qui parvient à expiration le 27 février. Cet accord avait été signé entre Bruxelles et Rabat le 29 juillet 2005 mais son entrée en vigueur n’est intervenue que le 28 février 2007 pour une période de quatre ans.

Le forcing de Madrid

Madrid fait du forcing à cet effet après avoir acquis la certitude, tout au long de l’année écoulée qui avait été marquée notamment par les graves violations des droits de l’homme dans l’ancienne colonie espagnole, que les pays européens étaient, dans leur majorité, réticents à la reconduction d’un tel accord à cette date.

Des difficultés avaient en effet surgi tout au long des négociations à ce propos entre le gouvernement espagnol et la Commissaire européenne à la pêche, la Grecque Maria Damanaki. Cette dernière avait rappelé aux Espagnols, déjà en décembre dernier, que le Sahara occidental doit être exclu du futur accord, ce que l’Espagne, premier bénéficiaire de cet accord, a évidemment fermement rejeté.

La commissaire européenne a fait valoir surtout le rapport que les services juridiques du Parlement de Strasbourg avaient rendu public en 2010, dans lequel ils avertissaient la commission que cet accord viole la légalité internationale car le Sahara occidental est classé territoire non autonome par les Nations unies. Les parlementaires, à l’initiative du groupe d’activistes conduit par Willy Meyer, avaient alors exigé sa suspension ou d’en exclure le Sahara occidental.

Territoire non autonome

Mme Damanaki a fait observer à la ministre espagnole de la Pêche, Mme Rosa Aguilar, un principe que cette transfuge du parti de la Gauche-Unie (communiste) défendait avant d’opter pour le Parti socialiste de Zapatero : la communauté internationale ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental.

En plus, a ajouté la Grecque, les Eurodéputés ont fait ce constat irréfutable : la population sahraouie n’a pas bénéficié de l’exploitation de ses ressources maritimes qui rapportent au Maroc la somme de 50 millions d’euros/an et une assistance gratuite pour la modernisation de ses chalutiers.

Le Danemark est en tête des pays qui ont fait obstacle aux démarches du gouvernement espagnol visant à consacrer l’élargissement de fait de l’accord de pêche aux eaux territoriales sahraouies. Madrid a de sérieuses raisons de le faire, car la prévisible non-reconduction de cet accord paralyserait le secteur-clé de la pêche en Andalousie et aux Canaries.

Il y a par ailleurs de bonnes raisons pour le Parlement européen de bloquer la conclusion du projet d’accord entre Rabat et Bruxelles en matière de commercialisation des fruits et légumes. Un tel projet a déjà provoqué de fortes protestations parmi les syndicats des agriculteurs espagnols qui craignent une concurrence déloyale des produits agricoles marocains.

Grâce un tel accord, le Maroc pourrait porter jusqu’à 52 000 tonnes le volume de ses exportations en tomates sur le marché espagnol en particulier et européen en général. Les services juridiques du Parlement européen ont, là encore, fait observer que l’accord de commercialisation des fruits entre Rabat et Bruxelles ne devrait pas, non plus, être élargi au Sahara occidental.

Strasbourg paralyse l’expulsion de 16 Sahraouis

Au sein des institutions de l’Union européenne, il est question, en outre, d’un autre aspect découlant de l’occupation du Sahara occidental par le Maroc.

Le cas de la procédure d’expulsion frappant 16 des 22 jeunes Sahraouis qui ont demandé le droit d’asile en Espagne pour échapper aux poursuites engagées contre eux par la police marocaine.

Le Tribunal des droits de l’homme de Strasbourg a invité, mardi le gouvernement espagnol à geler cette procédure d’expulsion qui a été confirmée par sentence, vendredi, par l’Audience nationale, la plus haute juridiction pénale espagnole. Un porte-parole du ministre espagnol de l’Intérieur a déclaré que le gouvernement Zapatero «suivra les instructions du Tribunal européen».

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